NARCISSE

« La jouissance exclut jusqu’aux hommes, comme s’ils n’étaient qu’alibis du rapport exclusif que les femmes entretiennent à leur propre et lointaine image (vérifiant peut-être l’idée étrange que la jouissance se prend à l’exclusion de la terre entière).
Une succession aride, rythmée, presque funèbre, de portraits féminins figées dans leurs miroirs, comme autant de tableaux vieillis, inaccessibles, intouchables, fascination dure et glacée qui est peut-être la violence même: l’impossibilité de répondre, l’impossibilité pour celui qui regarde de se faire une place. Car l’image n’est pas telle qu’on ait quelque choses à en dire, elle tait toute parole, elle ne ménage aucun double-fond, aucun au-delà à désirer, tout est là, sinon ceci: ce trouble propre aux miroirs, dont Borges écrivait qu’ils « inquiètent les couloirs », dont on pourrait ajouter qu’ils creusent des trous dans le réel, qu’ils le rendent à l’état de fantôme – c’est à dire aussi bien de fantasme. Voilà en tout cas ce qu’il y a lieu dans le « Narcisse » de Sonia Koumskoff. Nulle joie là-dedans, les visages ne sourient pas, leurs postures ressemblent un peu à la mort, comme si cette mort, ce figement là, était le prix de leur beauté et que leur image dans le miroir ne pouvait avoir lieu qu’au sacrifice de leur réalité vivante. »
Cédric Lagandré

Vue de l’installation. SEVENTY SEVEN 77, 2004 (DV pal, couleurs,durée: 04’55). VANITY FAIR, 2005 (Sculpture, silicone, plâtre, acrylique, strass, miroir au plomb, 120×120 cm. )

NARCISSEVANITY FAIR, détails.

NARCISSEN#V (tirage « lambda » 60x90cm d’après négatif, 2004 )

Vue de l’installation. VANITY FAIR. N#I,II, III, IV, V (tirages « lambda » 60x90cm d’après négatifs, 2004 )

Exposition collective « Girls, Girls, Girls. » au CAN (centre d’Art Neuchatel), Suisse, 2005. Commissaires : Stephane Pencreac’h et Richard Leydier